18 février 2021
Vers la fin de l’intéressement ?
18 février 2021
Sommaire

1. Qu’est-ce que l’intéressement ? 

2. Les négo­cia­tions en cours

2.a. L’intéressement sur les résul­tats financiers

2.b. L’intéressement à la qua­li­té / sécurité

3. Liste des types d'événements

Dans notre entre­prise, il existe depuis plu­sieurs années un accord d'intéressement, renou­ve­lé tous les trois ans. Il se décline en deux « primes » : une sur les résul­tats finan­ciers de l'entreprise – ver­sée une fois par an si les objec­tifs finan­ciers de l’année pré­cé­dente sont atteints –, l'autre sur les per­for­mances en matière de qua­li­té / sécu­ri­té – ver­sée par site tous les 4 mois si les objec­tifs du qua­dri­mestre pré­cé­dent sont atteints par l’ensemble glo­bal des salariéEs affectéEs sur le site. 

L’accord d’intéressement actuel a pris fin au 31 décembre 2020. Les éven­tuels inté­res­se­ments ver­sés cette année 2021 pren­dront en compte les résul­tats de l’année 2020. Pour que les éven­tuels inté­res­se­ments ver­sés en 2022 puissent prendre en compte les résul­tats de 2021, un accord d’intéressement doit être signé dans les pro­chaines semaines. 

C’est pour­quoi, actuel­le­ment, la direc­tion et les Organisations Syndicales (OS) de l’entreprise négo­cient l’éventuel pro­chain accord d'intéressement. Or la direc­tion veut trans­for­mer radi­ca­le­ment cet accord. Explications.

Qu’est-ce que l’intéressement ?

Pour com­men­cer, chacunE doit savoir en quoi consiste un inté­res­se­ment. L’intéressement a pour objet d'associer col­lec­ti­ve­ment les salariéEs aux résul­tats et/ou aux per­for­mances de l'entreprise.

  • Il pré­sente obli­ga­toi­re­ment un carac­tère aléa­toire (on ne peut connaître le mon­tant à l'avance et ce der­nier doit pou­voir être de 0 si les objec­tifs ne sont pas atteints) et résulte d'une for­mule de cal­cul liée à ces résul­tats ou per­for­mances. Tout accord qui fixe des objec­tifs sans carac­tère d’amélioration, de sorte que les salariéEs sont assuréEs de per­ce­voir l’intéressement quels que soient les résul­tats ou per­for­mances, est illégal.
  •  Il est obli­ga­toi­re­ment cal­cu­lé sur des résul­tats col­lec­tifs. Tout accord d’intéressement qui se fonde sur des résul­tats indi­vi­dua­li­sés est illégal.
  •  Il est facul­ta­tif (contrai­re­ment à l'accord de par­ti­ci­pa­tion qui est obligatoire).
  •  Pour être mis en place, il doit faire l’objet d’un accord d’entreprise, donc être signé par un nombre suf­fi­sant d’OS consti­tuant une majo­ri­té repré­sen­ta­tive. A défaut d’OS, un accord d’intéressement peut être conclu avec le CSE.

L'entreprise est tota­le­ment exo­né­rée de coti­sa­tions sociales sur les sommes ver­sées aux salariéEs dans le cadre de l'intéressement. Les « primes » per­çues ne sont pas des Eléments Variables de Salaire (EVS), ne sont pas du salaire. C'est exac­te­ment comme être payé « au black », sauf que c'est légal. C'est un dis­po­si­tif mis en place par le patro­nat pour détruire la sécu­ri­té sociale.

Par défi­ni­tion, les salariéEs sont perdantEs au glo­bal, com­pa­ré à un élé­ment de salaire, si on consi­dère seule­ment la pen­sion de retraite dimi­nuée et les frais de san­té aug­men­tés, mais encore les allo­ca­tions fami­liales dimi­nuées, l'indemnité chô­mage dimi­nuée le cas échéant, etc. C’est bien la rai­son pour laquelle, his­to­ri­que­ment, la CGT s’est bat­tue pour fon­der et défendre pen­dant 75 ans un sys­tème de sécu­ri­té sociale qui, par défi­ni­tion, va dans l’immense inté­rêt des salariéEs.

Les entre­prises qui mettent en place l'intéressement béné­fi­cient des avan­tages fis­caux suivants :

  •  Déduction du béné­fice impo­sable des sommes ver­sées dans le cadre de l'intéressement ;
  •  Exonération de taxes sur les salaires, de taxes d'apprentissage et de par­ti­ci­pa­tions à la for­ma­tion conti­nue et à la construction ;
  •  Déduction du béné­fice impo­sable de la prime excep­tion­nelle de pou­voir d'achat  ;
  • Sous cer­taines condi­tions, et si les sommes sont ver­sées dans le cadre d'un plan d'épargne sala­riale, droit de consti­tuer une pro­vi­sion pour inves­tis­se­ment. Cette pro­vi­sion ne doit pas dépas­ser 50 % des sommes ver­sées par l'entreprise pour com­plé­ter l'intéressement, lorsqu'il est infé­rieur au pla­fond légal.

C'est donc un dis­po­si­tif qui contri­bue aus­si à détruire les ser­vices publics.

Lorsque l’intéressement est ver­sé, si le ou la salariéE sou­haite obte­nir le ver­se­ment immé­diat de la somme (en tota­li­té ou en par­tie), il ou elle doit le deman­der dans un délai de 15 jours à par­tir de la date à laquelle il ou elle est informéE du mon­tant qui lui est attri­bué. Si on ne demande pas le ver­se­ment immé­diat de la somme, celle-ci est auto­ma­ti­que­ment pla­cée sur un Plan d’Épargne d'Entreprise (géré par Amundi dans notre entre­prise), qui per­met à l'entreprise de faire ce qu'elle veut avec notre argent, et en l'occurrence de jouer en bourse (au risque de tout perdre), en échange de quoi les sommes pla­cées ne sont pas sou­mises à l’impôt sur le revenu.

Quoi qu’il en soit, les sommes reçues sont sou­mises aux contri­bu­tions sociales (CSG et CRDS), c'est-à-dire impo­sables à la source par les seules contri­bu­tions où seulEs les salariéEs paient et pas le patron.

Si un accord est conclu, il est éta­bli pour une durée com­prise entre 1 et 3 ans.

En somme, la nature même de l’intéressement ne va pas dans l’intérêt des salariéEs. C’est pour­quoi SUD-Rail a com­men­cé par pro­po­ser que les sommes poten­tiel­le­ment allouées à l’intéressement soient plu­tôt ver­sées aux salariéEs dans un autre cadre, sous forme de primes trans­for­mées  en élé­ments de salaire, ce qui implique pour l’employeur de coti­ser. Mais cette pro­po­si­tion a été reje­tée à la fois par la direc­tion et par les autres OS (CGT et UNSA).

Afin de ne pas léser les salariéEs qui, depuis de nom­breuses années, ont tou­jours connu un accord d’intéressement dans l’entreprise, et par­fois per­çu des sommes non négli­geables, SUD-Rail se dit mal­gré tout prête à négo­cier un nou­vel accord d’intéressement, dans l’objectif de faire pro­fi­ter, tant que faire se peut, les salariéEs des bons résul­tats de l’entreprise, les résul­tats étant « bons » avant tout grâce au tra­vail des salariéEs. Mais, jusqu’à pré­sent, le pro­jet de la direc­tion est pour le moins… dégradant.

Les négo­cia­tions en cours

En ver­tu des pré­cé­dents accords d’entreprise, l’intéressement glo­bal résulte d’une part d’un inté­res­se­ment sur les résul­tats finan­ciers et d’autre part d’un inté­res­se­ment sur les per­for­mances en matière de qua­li­té et de sécu­ri­té. Voici le bilan de cet inté­res­se­ment glo­bal de 2015 à 2019 :

 L’intéressement sur les résul­tats financiers

Selon le pré­cé­dent accord d’intéressement, l’intéressement sur les résul­tats finan­ciers était cal­cu­lé par tranche, selon un pour­cen­tage sur le résul­tat net d’exploitation de l’année N-1.

Pour le pro­chain accord, la direc­tion veut chan­ger la for­mule de cal­cul. Cet inté­res­se­ment ne serait plus cal­cu­lé sur le résul­tat net d'exploitation mais par rap­port à la Marge Opérationnelle pré­vue au bud­get (MOP), c’est-à-dire le résul­tat brut d'exploitation, ce qui fait que les inves­tis­se­ments et amor­tis­se­ments (achat de loco­mo­tives, litiges avec les clients, etc.) ne vien­draient plus impac­ter le mon­tant de cet inté­res­se­ment. Il serait désor­mais fixé for­fai­tai­re­ment en fonc­tion du niveau de MOP réel.

Ce qui don­ne­rait, en l’état actuel des négociations :

- de 80% à 99% MOP / bud­get = 800 euros par salariéE ;

- de 100% à 109% MOP / bud­get = 1000 euros par salariéE ;

- de 110% à 119 % MOP / bud­get = 1100 euros par salariéE ;

- à par­tir de 120 % MOP / bud­get = 1200 euros par salariéE.

SUD-Rail a deman­dé l’ajout de paliers sup­plé­men­taires (un palier tous les +5%) et une aug­men­ta­tion des mon­tants (1000 euros par salariéE à 90% MOP / bud­get jusqu’à 1600 euros à 120%, ce qui aurait fait 100 euros sup­plé­men­taires par palier de +5%), mais la direc­tion refuse d’augmenter les mon­tants, et a concé­dé sim­ple­ment d’ajouter seule­ment deux paliers sup­plé­men­taires : un à 80% et un autre à 110%.

A pre­mière vue, on pour­rait pen­ser que cette nou­velle for­mule de cal­cul est à l’avantage des salariéEs, mais une simu­la­tion com­pa­ra­tive sur les 7 der­nières années (de 2013 à 2019) montre le contraire :

Au glo­bal, si on se fie à l’historique, chaque salariéE aurait per­çu légè­re­ment moins avec la nou­velle for­mule. La direc­tion affirme qu'on serait gagnant sur les pré­vi­sions des résul­tats 2020 et 2021 (qu'on ne connaît pas encore) ...

A noter éga­le­ment qu’avec cette nou­velle for­mule, un pla­fond est de fait ins­tau­ré. AucunE salariéE ne pour­rait per­ce­voir plus de 1200 euros, quand bien même les résul­tats finan­ciers de l’entreprise dépas­se­raient les 150% MOP / bud­get (comme en 2013, par exemple) ou bien auraient per­mis, selon l’ancienne for­mule, de faire mon­ter en théo­rie le mon­tant cumu­lé de l’intéressement et de la par­ti­ci­pa­tion jusqu’au tiers du résul­tat d’exploitation de l’exercice, et donc poten­tiel­le­ment bien au-dessus des 1200 euros (seuil dépas­sé en 2015, par exemple).

La dif­fé­rence entre les deux for­mules étant faible, SUD-Rail est prête à faire confiance aux pré­vi­sions des années à venir et, pre­nant en compte l’intention de la direc­tion d’investir pro­chai­ne­ment dans des EM élec­triques, est prête à accep­ter la nou­velle for­mule de cal­cul, à condi­tion de rééva­luer les mon­tants jusqu’à 1400 euros et d’instaurer des paliers sup­plé­men­taires dès 60% MOP / bud­get. Ce qui donnerait :

- de 60% à 69 % MOP / bud­get = 800 euros par salariéE ;

- de 70% à 79% MOP / bud­get = 900 euros par salariéE ;

- de 80% à 89% MOP / bud­get = 1000 euros par salariéE ;

- de 90% à 99% MOP / bud­get = 1100 euros par salariéE ;

- de 100% à 109% MOP / bud­get = 1200 euros par salariéE ;

- de 110% à 119 % MOP / bud­get = 1300 euros par salariéE ;

- à par­tir de 120 % MOP / bud­get = 1400 euros par salariéE.

L’intéressement à la qua­li­té / sécurité

Selon le pré­cé­dent accord d’intéressement, l’intéressement à la qua­li­té / sécu­ri­té était cal­cu­lé par site. Afin de mettre fin aux dis­pa­ri­tés consta­tées entre sites, puisque les salariéEs affectéEs sur des sites nom­breux en per­son­nel ne per­ce­vaient jamais cet inté­res­se­ment contrai­re­ment aux « petits » sites, cet inté­res­se­ment à la Q/S serait désor­mais cal­cu­lé au péri­mètre de l’entreprise, tous sites et toutes acti­vi­tés confondues.

SUD-Rail par­tage le constat de l’injustice que consti­tue le péri­mètre « site ». Et dans la mesure où il est illé­gal d’individualiser dans le cadre d’un inté­res­se­ment – il fau­drait sor­tir cette prime de l’intéressement et en faire un EVS, ce qui a été refu­sé par la direc­tion, la CGT et l’UNSA –, même s’il peut paraître inéqui­table que par exemple le métier de conducteur/trice impacte l’intéressement des OFI et réci­pro­que­ment, SUD-Rail est prête, dans cette négo­cia­tion, à faire un pas vers la direc­tion sur ce point, cette nou­velle for­mule ayant au moins l’intérêt de rendre l’ensemble des salariéEs de l’entreprise soli­daires, au lieu de nous divi­ser par activité.

Selon le pré­cé­dent accord d’intéressement, cet inté­res­se­ment était cal­cu­lé au titre de chaque qua­dri­mestre civil, ver­sé en juin pour le pre­mier qua­dri­mestre, en octobre pour le second et en février pour le troi­sième. Afin de rendre le mon­tant de cet inté­res­se­ment « plus signi­fi­ca­tif », il serait désor­mais cal­cu­lé selon une pério­di­ci­té annuelle et donc ver­sé en une seule fois par an (vers le mois de mai).

SUD-Rail a bien conscience que cette nou­velle for­mule de la direc­tion a pour consé­quence, d’une part, de mettre fin aux petites sommes régu­lières (tous les 4 mois) que pou­vaient per­ce­voir les salariéEs et qui per­met­taient éven­tuel­le­ment d’arrondir les fins de mois, notam­ment pour les plus bas salaires, et, d’autre part, de réduire poten­tiel­le­ment les chances de per­ce­voir un peu d’intéressement puisque, dans l’hypothèse où un qua­dri­mestre était très mau­vais et un autre très bon, les salariéEs per­ce­vaient au moins pour un qua­dri­mestre, alors qu’avec cette nou­velle for­mule, si la moyenne de l’année est mau­vaise, il n’y aura pas d’intéressement, quand bien même un qua­dri­mestre aura été bon. Mais SUD-Rail est prête, dans cette négo­cia­tion, à faire un autre pas vers la direc­tion sur ce point, cette nou­velle for­mule ayant non seule­ment l’intérêt de repré­sen­ter une prime plus consé­quente vers le mois de mai (à la manière de la prime de fin d’année), mais sur­tout ne dépend en réa­li­té que des cri­tères et des objec­tifs qui seront pris en compte dans le cal­cul de cet inté­res­se­ment, de sorte que le pas­sage à une pério­di­ci­té annuelle n’aurait aucun impact.

Enfin, selon le pré­cé­dent accord, cet inté­res­se­ment à la Q/S était cal­cu­lé selon deux cri­tères : le nombre d’incidents (cri­tère C1) – quasi-incidents, inci­dents et acci­dents à res­pon­sa­bi­li­té exclu­sive de l’entreprise – d’une part, et le nombre d’accidents du tra­vail avec arrêt (cri­tère C2) – hors acci­dents de tra­jets – d’autre part.

Pour le cri­tère C1, une valeur (0, 0.5, ou 1) était attri­buée à chaque évé­ne­ment sécu­ri­té. Et le mon­tant de l’intéressement était cal­cu­lé en fonc­tion de la valeur cumu­lée sur le qua­dri­mestre pour le site. L’objectif pour chaque site était donc de ne pas dépas­ser, au pire, une valeur cumu­lée de 1,5 sur le qua­dri­mestre. Si la valeur cumu­lée des inci­dents sur le qua­dri­mestre était infé­rieure à 1, touTEs les salariéEs du site per­ce­vaient un inté­res­se­ment de 120 euros en fonc­tion des effec­tifs Equivalents Temps Plein (ETP) ; pour une valeur cumu­lée de 1 ou 1,5, ils et elles ne per­ce­vaient que 60 euros en fonc­tion des ETP ; et à par­tir d’une valeur de 2, plus rien.

Pour le cri­tère C2, l’objectif pour chaque site était de ne pas dépas­ser 0 acci­dent du tra­vail sur le qua­dri­mestre, auquel cas les salariéEs du site per­ce­vaient un inté­res­se­ment de 90 euros en fonc­tion des ETP.

Pour le pro­chain accord, la direc­tion veut prendre en compte, non plus deux, mais quatre cri­tères dis­tinc­tifs et cumu­la­tifs, avec cha­cun son objec­tif et son mon­tant asso­cié : le nombre de bles­sés graves (cri­tère 1), le nombre d’événements graves (cri­tère 2), le taux de gra­vi­té des acci­dents du tra­vail (cri­tère 3) et le nombre d’événements sécu­ri­té (cri­tère 4).

Pour le cri­tère 1, unE blesséE est considéréE être dans une situa­tion grave lorsque l'événement pro­fes­sion­nel à l'origine de ses bles­sures entraîne son hos­pi­ta­li­sa­tion au moins 24 heures. Pour ce cri­tère, l'objectif à atteindre serait de 0 blesséE grave sur l’année, auquel cas chaque salariéE per­ce­vrait 75 euros. Autrement dit, si, dans l’année, unE seulE salariéE fait l’objet d’une hos­pi­ta­li­sa­tion d’au moins 24 heures à la suite d’un évé­ne­ment pro­fes­sion­nel à res­pon­sa­bi­li­té Captrain, touTEs les salariéEs de l’entreprise seront privéEs d’un inté­res­se­ment de 75 euros.

Pour le cri­tère 2, un évé­ne­ment est consi­dé­ré comme grave lorsqu'il aurait pu avoir des consé­quences humaines col­lec­tives (nombreux/ses blesséEs graves et/ou plu­sieurs mortEs). Pour ce cri­tère, l'objectif à atteindre serait de 0 évé­ne­ment grave sur l’année, auquel cas chaque salariéE per­ce­vrait 75 euros. Autrement dit, si, dans l’année, unE seulE salariéE est res­pon­sable d’un évé­ne­ment sécu­ri­té qui aurait pu faire de nombreux/ses blesséEs et/ou plu­sieurs mortEs, touTEs les salariéEs de l’entreprise seront privéEs d’un inté­res­se­ment de 75 euros.

Pour le cri­tère 3, le taux de gra­vi­té repré­sente le nombre de jour­nées indem­ni­sées pour 1 000 heures tra­vaillées. Il est repré­sen­ta­tif de la gra­vi­té d'un acci­dent : plus l'accident est grave, plus le nombre de jours d'arrêt est long ; plus il y a de jours d’arrêt de tra­vail suite à un acci­dent du tra­vail dans l’année, plus le taux de gra­vi­té aug­mente. D'après la Caisse Nationale d'Assurance Maladie, ce taux est pré­oc­cu­pant lorsqu'il est supé­rieur à 0,5. Pour ce cri­tère, l'objectif à atteindre serait un taux de gra­vi­té infé­rieur ou égal à 0,4, auquel cas chaque salariéE per­ce­vrait 150 euros. Autrement dit, si, à la fin de l’année, le nombre cumu­lé par les salariéEs de jours en arrêt suite à un acci­dent du tra­vail fait dépas­ser le taux de gra­vi­té de 0,4, touTEs les salariéEs de l’entreprise seront privéEs d’un inté­res­se­ment de 150 euros.

Enfin, pour le cri­tère 4, le nombre d'événements sécu­ri­té comp­ta­bi­li­sé chaque année au sein de l'entreprise cor­res­pond à celui pré­sen­té dans le cadre du bilan social. Ce nombre d'événements sécu­ri­té concerne tous les quasi-incidents, inci­dents et acci­dents à res­pon­sa­bi­li­té Captrain, sur toutes les acti­vi­tés de l’entreprise.

Un quasi-incident est un « évè­ne­ment qui, dans d’autres cir­cons­tances ou asso­cié à d’autres faits, aurait pu pro­vo­quer un inci­dent ou un acci­dent ».

Un inci­dent est un « évè­ne­ment ayant des consé­quences sur la sécu­ri­té, la pro­duc­tion et/ou ayant pro­vo­qué des consé­quences maté­rielles sans gra­vi­té (répa­ra­tion mineure, remise en état immé­diate…) ».

Un acci­dent est un « évè­ne­ment sécu­ri­té ayant pro­vo­qué des consé­quences graves (dégâts maté­riels impor­tants, atteinte aux per­sonnes, à l'environnement) ».

Voici la longue liste des types d’événements rele­vant poten­tiel­le­ment de l’une, de deux ou de ces trois caté­go­ries (selon la situa­tion de l’événement) et qui, à condi­tion d’être à res­pon­sa­bi­li­té Captrain, seraient comp­tés dans le nombre d’événements sécu­ri­té impac­tant l’intéressement à la Q/S.

Liste des types d'événements

Exploitation*

Conduite*

Matériel*

Manutention*

Production*

Circulation*

Infrastructure SI/ITE*

Sécurité du personnel*

Divers*

* Tableau extrait du RA210, modi­fié pour ne conser­ver que ce qui concerne le pré­sent sujet.

Pour ce cri­tère 4, l'objectif à atteindre serait un nombre d'événements sécu­ri­té infé­rieur ou égal à 70, avec un palier supé­rieur : si le nombre est supé­rieur à 70 mais infé­rieur ou égal à 80, chaque salariéE per­ce­vrait 265 euros ; et si le nombre est infé­rieur ou égal à 70, chaque salariéE per­ce­vrait 350 euros. Autrement dit, si, à la fin de l’année, la somme des quasi-incidents, inci­dents et acci­dents à res­pon­sa­bi­li­té Captrain, toutes acti­vi­tés confon­dues, dépasse 80, touTEs les salariéEs seront privéEs d’un inté­res­se­ment de 265 euros et a for­tio­ri de 350 euros.

Afin de se faire une idée de l’impact de ces quatre cri­tères sur le ver­se­ment de l’intéressement à la Q/S, voi­ci un réca­pi­tu­la­tif des chiffres dont dis­pose la direc­tion sur les der­nières années pour cha­cun de ces critères.

Pour SUD-Rail, dans l’ensemble, les objec­tifs sont trop ambi­tieux et, en l’état, pri­ve­raient les salariéEs de sommes consi­dé­rables en rédui­sant trop sou­vent l’intéressement à la Q/S à quelques dizaines d’euros par salariéE.

Concernant le cri­tère 1, la direc­tion n'est pas sûre du nombre de blesséEs graves sur les dix der­nières années (autant dire que c'est sans doute plus) ; or, sur les trois cas réper­to­riés (2011, 2014 et 2017), on sait notam­ment que deux ont don­né lieu à plu­sieurs années d'arrêt de tra­vail, ce qui impacte consi­dé­ra­ble­ment le cri­tère 3 par effet de dou­blon. Car ce cri­tère 1 fait en effet dou­blon avec le cri­tère 3 : un même fait sécu­ri­té occa­sion­nant unE blesséE grave impac­te­rait les deux cri­tères en met­tant fin à la pos­si­bi­li­té d’atteindre l’objectif du cri­tère 1 et en rédui­sant simul­ta­né­ment les pos­si­bi­li­tés d’atteindre l’objectif du cri­tère 3. On peut même dire qu’il fait tri­plon, fai­sant éga­le­ment dou­blon avec le cri­tère 4, puisqu’unE blesséE grave à la suite d’un évé­ne­ment pro­fes­sion­nel à res­pon­sa­bi­li­té Captrain réduit for­cé­ment simul­ta­né­ment les pos­si­bi­li­tés d’atteindre l’objectif du cri­tère 4, dans la mesure où il consti­tue éga­le­ment un évé­ne­ment sécu­ri­té sup­plé­men­taire. On peut même sup­po­ser for­te­ment qu’il fasse qua­dru­plon, puisqu’il met­trait sans doute fin éga­le­ment à la pos­si­bi­li­té d’atteindre l’objectif du cri­tère 2, un évé­ne­ment à res­pon­sa­bi­li­té Captrain ayant cau­sé unE blesséE grave étant sans aucun doute comp­té comme évé­ne­ment grave.

Concernant le cri­tère 2, les chiffres montrent que l’objectif est rare­ment attei­gnable. D’autant plus que la défi­ni­tion (« un évé­ne­ment est grave lorsqu'il aurait pu avoir des consé­quences humaines col­lec­tives ») laisse une place consi­dé­rable à l’interprétation. Il est dif­fi­ci­le­ment accep­table de condam­ner une per­sonne, et en l’occurrence touTEs les salariéEs de l’entreprise, pour des faits qui auraient pu se pro­duire mais qui ne se sont pas pro­duits (par­fois même grâce, pré­ci­sé­ment, à une bonne réac­tion de la per­sonne fau­tive). Par ailleurs, ce cri­tère 2 fait éga­le­ment dou­blon avec le cri­tère 4 : un même évé­ne­ment sécu­ri­té, s’il est jugé grave, impac­te­rait les deux cri­tères en met­tant fin à la pos­si­bi­li­té d’atteindre l’objectif du cri­tère 2 et en rédui­sant simul­ta­né­ment les pos­si­bi­li­tés d’atteindre l’objectif du cri­tère 4.

Concernant le cri­tère 3, les chiffres des dix der­nières années montrent que l’objectif est qua­si­ment inat­tei­gnable. Plus grave, ce cri­tère incite à ne pas décla­rer les acci­dents du tra­vail, ce qui est une manière de contour­ner la res­pon­sa­bi­li­té de l’employeur en matière de sécu­ri­té. Par appât du gain que consti­tue l’intéressement, les salariéEs sont pousséEs à ne pas se décla­rer en acci­dent du tra­vail (mais plu­tôt en arrêt mala­die non pro­fes­sion­nelle par exemple), quand bien même un acci­dent sur­ve­nu par le fait ou à l'occasion du tra­vail, quelle qu'en soit la cause, doit être consi­dé­ré comme acci­dent du tra­vail. Au-delà du fait que le ou la salariéE, dans une telle méprise, est perdantE, ne serait-ce qu’en termes d’indemnités, l’employeur, lui, se voit ain­si déchar­gé de toute res­pon­sa­bi­li­té qui pour­tant lui incombe en cas d’accident du travail.

De même, les cri­tères 2 et 4 incitent à ne pas décla­rer les évé­ne­ments graves poten­tiel­le­ment « mas­quables », ce qui est à nou­veau une manière de contour­ner la res­pon­sa­bi­li­té de l’employeur en matière de sécurité.

Concernant le cri­tère 4, les chiffres des douze der­nières années montrent que ces objec­tifs sont rare­ment attei­gnables. D’autant plus que la direc­tion fait entendre depuis quelques mois que le car­net de com­mande de l’entreprise ne va ces­ser de se rem­plir. Un nombre de tra­fics en aug­men­ta­tion sup­pose presque inévi­ta­ble­ment un nombre d’événements sécu­ri­té en augmentation.

Tous ces cri­tères favo­risent un cli­mat social délé­tère entre les salariéEs qui se reprochent mutuel­le­ment d’avoir été vic­time d’un acci­dent du tra­vail ou res­pon­sable d’un évé­ne­ment sécu­ri­té, et donc d’avoir poten­tiel­le­ment pri­vé les col­lègues d’un inté­res­se­ment, ce qui contri­bue à rendre res­pon­sables les salariéEs en matière de sécu­ri­té, alors que seule la poli­tique de l’employeur en matière de condi­tions de tra­vail et de sécu­ri­té est res­pon­sable des acci­dents du tra­vail et sou­vent cause des évé­ne­ments sécu­ri­té (temps de repos, ampli­tudes, etc.).

Pour nous, ces cri­tères sont contraires aux prin­cipes de pré­ven­tion en matière de sécu­ri­té pré­vus par le Code du tra­vail, et font por­ter la res­pon­sa­bi­li­té de la sécu­ri­té sur les salariéEs alors que seul l’employeur est res­pon­sable, quand bien même un arrêt de la Cour de Cassation du 24 sep­tembre 2002 a ren­du légal ce genre d’intéressement, pre­nant le contre-pied de toutes les juris­pru­dences précédentes.

Enfin, pour nous, ces cri­tères sont dis­cri­mi­nants dans la mesure où ils privent les salariéEs d’un inté­res­se­ment sur des cri­tères liés aux condi­tions de tra­vail et à la poli­tique de l'entreprise en matière de sécu­ri­té dont elle est seule responsable.

Au motif de tout ce qui pré­cède, SUD-Rail a deman­dé, au pire, la conser­va­tion dans l'intéressement à la Q/S uni­que­ment du cri­tère 4 concer­nant le nombre des évé­ne­ments sécu­ri­té, et donc la sup­pres­sion des trois autres cri­tères. Par consé­quent, pour ce cri­tère 4, nous avons deman­dé une rééva­lua­tion du mon­tant et du nombre d’événements :

  • Un mon­tant de 730 euros pour un nombre d’événements sécu­ri­té com­pris entre 70 et 90 ;
  • Un bonus de 200 euros si le nombre d’événements est infé­rieur à 70.

Malheureusement, la direc­tion et les autres OS (CGT et UNSA) tiennent à conser­ver ces quatre critères.

SUD-Rail deman­de­ra à nou­veau la sup­pres­sion des cri­tères 1, 2 et 3, ain­si qu’une rééva­lua­tion des mon­tants, du nombre d’événements et de la nature des évé­ne­ments à prendre en compte :

  • Un mon­tant de 730 euros pour un nombre d’événements sécu­ri­té com­pris entre 70 et 85 (moyenne de 2015 à 2019) ;
  • Un bonus de 200 euros si le nombre d’événements est infé­rieur à 70 ;
  • La prise en compte uni­que­ment des inci­dents et acci­dents à res­pon­sa­bi­li­té Captrain, et non des quasi-incidents qui, par défi­ni­tion, n’ont pas cau­sé de pro­blème de sécu­ri­té dans les faits ;
  • La prise en compte de la liste des évé­ne­ments figu­rant en annexe du pré­cé­dent accord d’intéressement, et non celle figu­rant au RA210, avec la conser­va­tion des valeurs 0,5 et 1.

La pro­chaine réunion de négo­cia­tions est pré­vue le 26 février. Les salariéEs de l’entreprise sont invitéEs à nous faire part, s’ils ou elles le sou­haitent, de leurs réflexions, avis, pro­po­si­tions, par mail à sudrailcaptrain@gmail.com.

SUD-Rail ne signe­ra pas d’accord consti­tuant une dégradation !

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