1. Principes du droit de pause
2. Le droit de pause pour les salariéEs affectéEs à des tâches essentielles de sécurité
3. Le droit de pause pour les sédentaires « simples »
Certains droits salariaux sont importants du fait de leur intrication avec les questions de sécurité, en particulier dans le monde ferroviaire. Et pourtant ils ne sont habituellement que trop peu souvent exercés, parce que méconnus. C'est le cas notamment du droit de pause. Voici ce qu'il faut savoir sur ce droit.
Principes du droit de pause
L'Article L. 3121-16 du code du travail impose dans toutes les entreprises :
« Dès que le temps de travail quotidien atteint six heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes consécutives. »
L'employeur a donc l'obligation d'organiser le travail de sorte que chaque journée de service dont la durée atteint 6 heures de travail doit contenir une pause d'au moins 20 minutes. Cela ne signifie pas que la pause doit être prise au bout de 6 heures de travail (elle peut être prise bien avant), mais simplement que toute journée de travail d'au moins 6 heures doit prévoir une telle pause.
L'Article L. 3121-1 du code du travail définit le temps de travail effectif comme « le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ». Durant son temps de travail effectif, le ou la salariéE est donc à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives : il ou elle ne peut pas interrompre son activité professionnelle pour s'occuper librement de ses activités personnelles.
Le temps de pause est un arrêt de travail de courte durée sur le lieu de travail. Pendant le temps de pause, le ou la salariéE ne se trouve pas en principe sous la direction de son employeur. Il ou elle peut donc librement vaquer à ses occupations personnelles sans avoir à respecter les directives de son employeur : pour téléphoner, prendre un café, fumer une cigarette, se restaurer ou faire une sieste par exemple.
Par conséquent, la pause n'est en principe pas rémunérée, puisqu'elle n'est pas comptée comme un temps de travail effectif. Néanmoins, selon l'Article L. 3121-2 du code du travail, le temps de pause doit être considéré comme temps de travail effectif, et donc rémunéré, dès lors qu'il remplit les conditions du temps de travail effectif. C'est notamment le cas lorsque le salarié accomplit une directive de son employeur pendant son temps de pause (exemple : lorsque l'employeur qui attend un appel demande à unE salariéE de surveiller le téléphone pendant son temps de pause) : car en effet, comment peut-on vaquer librement à ses occupations personnelles si l'on doit par exemple surveiller l'immobilisation d'un train pendant sa pause ? Dans cette hypothèse, le salaire est maintenu et le temps de pause est pris en compte dans le calcul de la rémunération.
Dans ce sens, en vertu de l'Article L. 3121-6 du code du travail, des dispositions conventionnelles peuvent prévoir une rémunération du temps de pause lorsque celui-ci n'est pas reconnu comme du temps de travail effectif. Bien plus, une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement, ou une convention ou un accord de branche, peut prévoir que le temps de pause sera systématiquement rémunéré. Or c'est le cas dans la branche ferroviaire, en vertu d'un usage. Si les pauses ne sont pas toutes considérées comme du temps de travail effectif, elles sont toutes systématiquement rémunérées comme temps de travail, au titre de la durée, c'est-à-dire de l'amplitude, de la journée de service.
Concernant les temps de pause, si le minimum de 20 minutes pour une journée de service dont la durée atteint 6 heures est clairement fixé, aucune durée n'est définie pour le maximum. Une tolérance existe concernant les temps de pause au travail dès lors que le ou la salariéE les prend de manière raisonnable, tant en termes de fréquence que de durée.
En pratique, un employeur peut sanctionner des abus par un avertissement, un blâme, une mise à pied disciplinaire, voire un licenciement pour faute. De son côté, le ou la salariéE qui estime que l'employeur ne respecte pas les temps de pause peut alerter l'inspection du travail et/ou saisir le Conseil de Prud'hommes.
Dans la branche ferroviaire, cette loi imposant une pause d'au moins 20 minutes pour 6 heures travaillées s'applique. C'est une obligation légale. Mais les conditions d'application varient selon les métiers. D'après la convention collective de la branche ferroviaire, pour ce qui concerne le droit de pause on doit distinguer entre le personnel roulant, le personnel sédentaire et le personnel sédentaire affecté à des activités liées aux horaires de transport et à l'assurance de la continuité et de la régularité du trafic. Mais dans le contenu, pour une entreprise telle que Captrain France, on peut distinguer entre l'application du droit de pause pour les salariéEs affectéEs à des tâches essentielles de sécurité (conducteur de ligne ou de manœuvre, opérateur sécurité au sol) d'un côté, et pour les sédentaires « simples » (OFI, agent du matériel, fonction support) de l'autre.
Le droit de pause pour les salarié(e)s affecté(e)s à des tâches essentielles de sécurité
« Aucun temps de travail quotidien ne peut atteindre six heures sans que le salarié roulant bénéficie obligatoirement d'un temps de pause d'une durée minimale de 20 minutes, non fractionnable.
A défaut de disposition spécifique prévue par accord d'entreprise, cette pause ne peut commencer au plus tôt qu'une heure trente après l'heure de prise de service, sauf si cela permet de l'accorder dans la plage horaire 11h30 / 13h30 ou 18h30 / 20h30.
La période de pause peut être remplacée par une période de repos équivalente attribuée au plus tard avant la fin de la journée de service suivante. »
En vertu de cet article, les salariéEs roulants, en l'occurrence les conducteurs ou conductrices de ligne (CDL) chez Captrain France, doivent obligatoirement bénéficier d'une pause d'au moins 20 minutes consécutives chaque fois que leur journée de service atteint la durée de 6 heures. L'entreprise est dans l'obligation de s'organiser pour que le ou la CDL bénéficie de cette pause au cours de sa journée de service si celle-ci atteint 6 heures.
L'article 48 de la deuxième partie de l'accord relatif au contrat de travail et à l'organisation du travail dans la branche ferroviaire stipule quant à lui :
« Aucun temps de travail quotidien ne peut atteindre 6 heures sans que le salarié bénéficie obligatoirement d'un temps de pause d'une durée minimale de 20 minutes, non fractionnable.
A défaut de disposition spécifique prévue par accord d'entreprise, cette pause ne peut commencer au plus tôt que 1h30 après l'heure de prise de service, sauf si cela permet de l'accorder dans la plage horaire 11h30 / 13h30 ou 18h30 / 20h30.
La période de pause peut être remplacée par une période de repos équivalente attribuée au plus tard avant la fin de la journée de service suivante. »
En vertu de cet article, les salariéEs sédentaires affectéEs à des activités liées aux horaires de transport et à l'assurance de la continuité et de la régularité du trafic, en l'occurrence les conducteurs ou conductrices de manœuvre (CME) et les opérateurs sécurité au sol (OSS) chez Captrain France, doivent obligatoirement bénéficier d'une pause d'au moins 20 minutes consécutives chaque fois que leur journée de service atteint la durée de 6 heures. L'entreprise est dans l'obligation de s'organiser pour que le ou la salariéE bénéficie de cette pause au cours de sa journée de service si celle-ci atteint 6 heures.
La règle est donc exactement la même pour les CDL, les CME et les OSS. Mais la particularité de leurs métiers pose question quant aux possibilités d'application de leur droit de pause : comment peuvent-ils l'exercer alors que leurs missions sont strictement encadrées dans l'espace et dans le temps ?
Par ailleurs, il existe précisément chez Captrain France une disposition spécifique prévue par accord d'entreprise. L'article 3.4 du titre I de l'accord d'entreprise de révision et d'harmonisation sociale du 17 novembre 2016 prévoit en effet : « La pause ne peut commencer au plus tôt qu'une heure après l'heure de prise de service, sauf si cela permet de l'accorder dans la plage horaire 11h30 / 13h30 ou 18h30 / 20h30 ». Autrement dit, pour touTEs les salariéEs de l'entreprise, le délai de 1h30 après la prise de service est réduit à 1h après la prise de service.
Concrètement, cet ensemble de dispositions signifie que si, accidentellement, unE conducteur ou conductrice qui se trouve en phase de conduite, ne se sent plus vigilantE et en éprouve le besoin, il ou elle peut tout à fait demander au service de gestion des circulations (SGC) à être garéE pour prendre une pause d'au moins 20 minutes. Il s'agit d'un droit d'usage et d'une question de sécurité : le SGC ne peut pas refuser si les conditions de garage le permettent ; à défaut, il doit reporter la pause un peu plus loin.
Cette pause ne peut toutefois être prise qu'après avoir atteint 1 heure de service après son heure de prise de service. Ce délai de 1 heure n'a pas besoin d'être atteint si la pause d'au moins 20 minutes est prise soit entre 11h30 et 13h30, soit entre 18h30 et 20h30, plages correspondant aux heures de repas.
Mieux vaut user de ce droit de pause que de persister dans la fatigue et risquer un incident ! En cas d'accident, la responsabilité du conducteur ou de la conductrice pourrait être mise en cause par la justice s'il ou elle n'a pas demandé sa pause et a persisté dans l'effort en l'absence de toutes ses facultés de vigilance.
Si le temps de pause n'a pas pu être pris pendant son temps de conduite, notamment en cas de retard, il ou elle peut tout à fait la prendre à la fin de sa mission, juste avant la fin de sa journée de service. Autrement dit, il ou elle peut le cas échéant intégrer cette durée de 20 minutes dans son bulletin de service, pour déterminer l'heure de fin de service. Cette durée de pause est en effet à prendre en compte dans l'amplitude de la journée de service. Mais il est clair pour SUD-Rail que la pause doit être prise pendant le temps de travail effectif si le conducteur ou la conductrice sent une baisse de vigilance dans son travail.
A défaut d'avoir pris cette pause dans sa journée de service d'au moins 6 heures, ce temps de pause d'au moins 20 minutes pourra être pris au cours de la journée de service suivante, et avant la fin de cette journée. Peu importe, cette fois, que la durée de cette journée de service atteigne 6 heures ou non.
Le droit de pause pour les sédentaires « simples »
« Aucun temps de travail quotidien ne peut atteindre 6 heures sans que le salarié bénéficie obligatoirement d'un temps de pause d'une durée minimale de 20 minutes, non fractionnable.
A défaut de disposition spécifique prévue par accord d'entreprise, cette pause ne peut commencer au plus tôt que 1h30 après l'heure de prise de service, sauf si cela permet de l'accorder dans la plage horaire 11h30 / 13h30 ou 18h30 / 20h30. »
En vertu de cet article, les salariéEs sédentaires, en l'occurrence les opérateurs ferroviaire industrie (OFI), les agents du matériel, les fonctions support, etc., chez Captrain France, doivent obligatoirement bénéficier d'une pause d'au moins 20 minutes consécutives chaque fois que leur journée de service atteint la durée de 6 heures. L'entreprise est dans l'obligation de s'organiser pour que le ou la salariéE sédentaire bénéficie de cette pause au cours de sa journée de service si celle-ci atteint 6 heures.
Au titre de disposition spécifique, l'article 3.4 du titre I de l'accord d'entreprise de révision et d'harmonisation sociale du 17 novembre 2016 prévoit : « La pause ne peut commencer au plus tôt qu'une heure après l'heure de prise de service, sauf si cela permet de l'accorder dans la plage horaire 11h30 / 13h30 ou 18h30 / 20h30 ». Autrement dit, comme pour touTEs les salariéEs de l'entreprise, le délai de 1h30 après la prise de service est réduit à 1h après la prise de service : cette pause ne peut donc être prise qu'après avoir atteint 1 heure de service après son heure de prise de service. Mais ce délai de 1 heure n'a pas besoin d'être atteint si la pause d'au moins 20 minutes est prise soit entre 11h30 et 13h30, soit entre 18h30 et 20h30, plages correspondant aux heures de repas.
UnE salariéE sédentaire « simple », dont la pause d'au moins 20 minutes n'a pas pu être prise dans sa journée de service d'au moins 6 heures, notamment à cause de retards, peut tout à fait la prendre à la fin de sa mission, juste avant la fin de sa journée de service. Autrement dit, il ou elle peut le cas échéant intégrer cette durée de 20 minutes dans sa journée de service afin qu'elle soit rémunérée.
Mais il est clair pour SUD-Rail que la pause doit être prise pendant le temps de travail effectif si le ou la salariéE sent une baisse de vigilance dans son travail. Mieux vaut user de ce droit de pause que de persister dans la fatigue et risquer de commettre une faute. En cas d'incident ou d'accident, la responsabilité du ou de la salariéE pourrait être mise en cause par la justice s'il ou elle n'a pas demandé sa pause et a persisté dans l'effort en l'absence de toutes ses facultés de vigilance.
Enfin, à la différence des salariéEs affectéeEs à des tâches essentielles de sécurité, le temps de pause non pris par unE salariéE sédentaire « simple » dans sa journée de service d'au moins 6 heures ne peut être reporté dans la journée de service suivante.
* Article modifié le 01/01/2021 : Suite au changement de nom de l'entreprise au 01/01/2021, les occurrences de "VFLI" ont été remplacées par "Captrain France".